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Disparition des ressources nectarifères ...

Cultivées ou sauvages, de plaine ou de montagne parlons des plantes mellifères.
Foué
Messages : 104
Localisation : Haute-Savoie

Disparition des ressources nectarifères ...

Message#1 » sam. mars 12, 2016 11:34 pm

Voici un article intéressant d'Alain Laperrousaz
Bonne lecture.[P1


DISPARITION DES RESSOURCES NECTARIFERES ET POLLINIFERES DANS LES ZONES DE PRAIRIES LAITIERES
Alain LAPERROUSAZ
‘’L’abeille et la fleur, c’est comme l’eau et le poisson: c’est indissociable. (Jean LOUVEAUX)
En prairie, comme dans d’autres milieux, le cycle biologique de la colonie est calqué sur celui de son environnement et plus particulièrement sur celui de son potentiel nectarifère et pollinifère. Les pissenlits, les petites brassicacées lancent la saison, avec leurs pollens riches en protéines ; les fabacées (trèfles, sainfoin, lotier, etc.) assurent la base quantitative de la miellée. Les autres familles botaniques dispensent normalement toute une diversité de plantes nécessaires à un approvisionnement pollinique de qualité jusqu’en fin de saison et permettre une mise en hivernage sans compléments énergétiques. Or les pratiques agricoles ont tellement changé ces dernières années que les ressources nectarifères et pollinifères ne cessent de diminuer, à un point tel que la vie de la ruche en est perturbée et compromise. C’est ce que nous allons essayer de montrer dans cet article à partir d’une expérience d’apiculteur de plus de 30 ans de métier ; fils d’agriculteur qui a vu au cours de sa vie professionnelle changer radicalement la flore des prairies et fondre les rendements des ruches sur ces milieux.
Le XIXème siècle a vu l’homme dominer la nature de toute sa puissante technologie. Et un processus de destruction du végétal et de l’écologie s’est accéléré. (Aline ROQUES RAYNAL ; la botanique redécouverte)
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Qu’entend-on par « modification des pratiques » ? Il s’agit d’un ensemble d’actions menées par les agriculteurs, sous la contrainte de la PAC, et qui aboutissent peu à peu à une modification de la composition des prairies, souvent non intentionnellement, mais inéluctablement
Place nette à la mécanisation : Le matériel agricole de plus en plus puissant pour les besoins de l’exploitation a fait par exemple disparaître les arbres fruitiers ‘’plein vent‘’ source importante de pollen et nectar exempts de pesticides. Pourtant, arbres et arbustes rendent les paysages vivants et structurés Les petites zones de mouillères ont disparu de même avec la mécanisation. L’apparition de la faucheuse conditionneuse ne fait rien d’autre que du broyat d’insectes butineurs se trouvant sur les quelques fleurs restantes.
Doses d’engrais inconsidérées
-Le surdosage en azote minéral élimine les fabacées (sainfoin ….), mais aussi toutes les espèces qui ne le supportent pas à haute dose, et sont étouffées par les poacées qui prolifèrent.
Le sureffectif d’animaux par rapport aux surfaces de prairies obligent les agriculteurs à apporter des doses démesurées de lisier, qui modifient la composition les sols, les acidifient et remanient complètement la composition floristique des prairies en faisant le lit des polygonacées, comme le rumex qui est très difficile à éliminer à moins d’utiliser des herbicides très puissants. En ce qui concerne le fumier, on a pu lire dans un hebdomadaire de la part d’un directeur de chambre d’agriculture que lui-même était presque surpris que son département en soit devenu exportateur car il manquait de surfaces agricoles pour son épandage.
Utilisation intempestive des produits phytosanitaires y compris dans les prairies. On peut trouver dans le commerce des herbicides sélectifs contre les espèces prairiales indésirables. Le pissenlit (Taraxacum officinalis) dont la floraison certaines années est très intéressante pour le développement à la fois de la colonie, de la production de miel et de pollen subit quelques fois ce désherbage sélectif et ce, en pleine floraison.
Remembrement au-delà du raisonnable qui fait disparaître des écosystèmes comme les haies. Grande source de nourriture pour les insectes à tous les étages (feuillus précieux ou essence noble en haute tige, nombreux arbustes mellifères, plus bordure herbacée intéressante).
Débroussaillage d’abord chimique, ensuite abandonné pour un débroussaillage mécanique (mauvaise image de l’agriculture : les haies donnaient l’impression d’avoir été incendiée au printemps ou en plein été.). Ce travail détruit les abris pour les oiseaux et de nombreux autres animaux, dont un grand nombre d’insectes auxiliaires indispensables de l’agriculture. Mais élimine aussi les espèces arbustives mellifères comme :
Le prunellier (Prunus spinosa),
L’aubépine (Crataegus laevigata et monogyna)
L’églantier (Rosa canina)
La bourdaine (Frangula alnus) etc. etc.
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Fauches précoces Dans le cas des fauches précoces, il suffit de le faire une fois et la disparition des fleurs dites ‘’annuelles’’ (graine à graine) est immédiate. Bien sûr il existe un stock de graines dans le sol mais ce stock s’épuise progressivement dans le cas d’autres coupes précoces répétées. Les conséquences de cette pratique ne touchent pas uniquement les abeilles mais aussi les vaches laitières qui ne font plus de bouses mais défèquent de l’eau (acidose). : La fauche précoce est sans doute la pratique la plus préjudiciable pour l’apiculture : on en est arrivé dans certains départements à des ‘’déserts verts.’’ Seules les espèces qui résistent aux multiples passages des lisiers et à la surcharge des engrais survivent.
Suppression des Vieilles prairies retournées au profit du ray-grass, du dactyle et des poacées en général dont le système racinaire étouffant empêche toute diversification floristique par la suite. On aboutit ainsi à de véritables monocultures, qui touchent aussi les prairies. On est bien dans le cas d’une culture intensive. Avec des conséquences graves même pour les agriculteurs qui voient leurs prairies complètement détruites par les mulots et campagnols à la sortie des hivers enneigés. Si l’on voulait faire de l’élevage de ces ravageurs, il ne faudrait pas s’y prendre autrement. Il n’y a pas si longtemps les producteurs laitiers produisaient eux-mêmes leurs céréales ce qui permettait, avec les labours, de détruire les galeries des campagnols et mulots et d’en limiter ainsi la surpopulation. Ceux qui échappaient à la destruction de leur habitat étaient attendus au coin des haies par leurs prédateurs naturels (renards, buses hiboux….) Là encore il y a une piste de convergence d’intérêts entre agriculteurs et apiculteurs. Mais est-ce que les décideurs agricoles sont prêts ?
La malnutrition chronique et les carences alimentaires mettent en danger l’existence de l’abeille.
Deux cas extrêmes où les rumex qui ont envahi ces deux prairies suite à un apport irraisonné de lisier. On peut constater la totale absence des autres familles botaniques. L’élimination de ces rumex ne se fera qu’avec l’utilisation des herbicides les plus puissants du marché. (Les polygonacées sont très dures à éliminer)
L’élimination des rumex est typique de faits en cascades qui vont suivre et annoncent ‘’une mort sur ordonnance’’ des abeilles. Les herbicides puissants utilisés sont ovicides et larvicides pour
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toute l’entomofaune (Leconte INRA). Et pour le cas particulier de l’abeille c’est encore plus grave car le pollen et le nectar contaminés diminuent les défenses immunitaires de la colonie et potentialise les maladies opportunistes comme les loques et la nosémose ou les parasites comme le varroa. Les abeilles domestiques ont besoin d’une nourriture de qualité et diversifiée afin de pouvoir mener leur développement larvaire correctement. Comme la rémanence de ces produits est importante, les ruchers de proximité seront en survie et ce pour plusieurs années encore.
Photo prise volontairement en hiver après des chutes de neige et plusieurs gelées. On peut constater les couleurs anormalement vert ‘’poireau’’ en cette saison. Les poacées, avec les excès d’azote n’ont plus leur période de dormance.
La diminution, voire la disparition des espèces botaniques florales dans les prairies françaises entrainent :
. Une diminution du potentiel nectarifère : la moyenne de production à la ruche n’a cessé de baisser en zone de production laitière, les seules sources restantes étant celles des forêts de proximité dans ces zones.
. Un appauvrissement du bol alimentaire qui permet aux abeilles de disposer de la totalité des nutriments nécessaires (en particulier des acides aminés essentiels, acides gras, etc. et on redécouvre l’intérêt d’une alimentation variée pour la prévention des maladies comme les loques). Les abeilles en sont même réduites à visiter le pollen de maïs, particulièrement carencé en acides aminés.
. Une baisse des défenses immunitaires des colonies : l’entrée de bactéricides et de bactériostatiques est moins importante (valence entre les atomes de glucose et des flavonoïdes) Les loques ainsi que Nosema se développent ainsi plus facilement.
. Une baisse de la population dans les ruches : La reine pond en fonction de l’entrée de nectar et de pollen : la référence en matière de ruche en zone de prairie de montagne
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est la ruche Dadant 12 cadres, que les abeilles ont maintenant du mal à peupler complètement
La réalité des faits confirme ce constat :
. La production de miel est déficitaire en France alors que presque toutes les filières agricoles ont à gérer des excédents.
. Les importations de paquets d’abeilles sont devenues pratiques courantes alors qu’elles étaient inexistantes il y a une quinzaine d’années.
. Le nourrissage des colonies pour la mise en hivernage est une obligation et un impératif alors qu’il y a une trentaine d’année il était occasionnel.
. La moyenne de production de miel à la ruche est maintenant plus importante en ville qu’en campagne
. Toute la population de l’entomofaune, dont l’abeille, diminue ; Les entomologistes constatent que les larves des autres insectes son frappés de nanisme et mettent bien en cause, entre autre, la diminution de provende.
. Tout apiculteur doit consacrer au minimum un tiers de son cheptel à l’élevage pour espérer retrouver un cheptel équivalent l’année suivante. Et ce, au dépend de la production de miel.
Dans le cas du monolectisme (cas où la fécondation d’une espèce botanique ne peut être réalisé que par une seule espèce d’insecte) la disparition d’une fleur entraine la disparition de l’insecte qui la pollinise et la disparition d’un insecte entraine la disparition de la fleur qu’il pollinise, comme par exemple chez les Orchidées. Nous assistons à un jeu de massacre en direct. L’abeille est plus épargnée de ce massacre car entre deux vols de butinage, elle peut changer d’espèce botanique. L’abeille n’est pas inféodée à une seule espèce et est dite par les entomologistes polylecte.
Il y a trente ans les prairies Françaises étaient multicolores, maintenant avec les contraintes imposées par les industriels de la transformation du lait et de la PAC aux agriculteurs, le paysage prairial est devenu monochrome et dans certains cas (absence de ressources forestières) il est non seulement impossible de produire du miel mais le principal souci de l’apiculteur est de maintenir un cheptel vivant et ce, même en l’absence de pesticides.
La disparition de la biodiversité dans les prairies ainsi que dans l’environnement est une préoccupation forte car il s’agit dès à présent de stopper l’érosion des espèces de donner aux futures générations la même chance et le même patrimoine que celui dont nous avons hérité. Il faut maintenant sauvegarder les espèces principales devenues rares. (Jacques WEBER)
Les prairies naturelles ont un rôle à jouer car elles sont associées et sont interdépendantes et interactives avec les autres écosystèmes et différentes niches écologiques. La biodiversité dans les prairies est un facteur de production et de productivité. Dans le cadre du programme de recherche européen « BIODEPTH » les chercheurs (KLAUSS ; SCHMILL, SCHMID, EDWARD) ont analysé les effets de la disparition des espèces botaniques dans une prairie, résultat: chaque baisse de moitié de la diversité des espèces réduit la récolte de biomasse végétale sèche de 80 gr par mètre carré. Soit 800 kg de foin en moins à l’hectare. De plus des études montrent (FRANE) que les prairies riches en
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espèces végétales variées sont plus stables et résistent mieux aux stress (sècheresse, surpâturage)). Cette capacité à tolérer des perturbations dépend largement des pratiques de gestion. D’autre part, il semble que la diversité floristique stimule l’appétit des animaux et leur ingestion. Le bétail ne connaît plus les différentes saveurs qu’offrait une prairie naturelle riche en diversité florale ;
Les agriculteurs bien avant les apiculteurs ont un intérêt économique dans les prairies permanentes et à favoriser une diversité floristique.
Magnifique rucher couvert entretenu (apier) situé sur la commune de VAULX en Haute Savoie. Toutes les familles agricoles disposaient autrefois d’apiers ou de ruches posées directement dans, ou à côté des chalets, qui produisaient un miel multi fleurs abondant et réputé.
Une fleur peut tout aussi bien nourrir un animal que l’entomofaune dont l’abeille. Et dans les deux cas la fleur est aussi leur pharmacopée. Mais maintenant l’insecte ou le cheptel bovin n’a plus de choix dans une prairie.
‘’Les animaux herbivores savent ainsi reconnaitre les plantes de leurs pâtures et les choisir en fonction d’‘une part de leur saveur qu’elles donnent à chaque bouchée, et d’autre part de leurs besoins physiologiques du moment’’ (Aline ROQUES RAYNAL) Dans la botanique redécouverte)
‘’La variabilité, l’hétérogénéité, la multiplicité des plantes, seuls garants de la pérennité de la vie diminuent dangereusement. Toute vie animale dépend en dernier ressort de l’efficacité biologique de la vie végétale; la nature est d’abord un couvert végétal riche, diversifié et équilibré, les animaux et l’entomofaune qui y vivent n’en sont que la conséquence et jouent même un rôle dans cet équilibre. La richesse du monde végétal, si elle est conservée, sera garante de la poursuite future de l’aventure humaine’’. (Aline ROQUES RAYNAL
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dans ‘‘La botanique redécouverte’’) Toutes les personnes qui adorent faire de longues marches dans les différents déserts de la planète bleue vous le confirmeront.
Les fabacées, les brassicacées, astéracées et toutes les autres familles botaniques diminuent dangereusement et parfois ont complètement disparu dans certaines prairies au seul profit des poacées alors qu’elles ont un intérêt productif, cynégétique entomophile et aident à l’automédication du cheptel bovin et de l’entomofaune.
Cette automédication profite également à tous les êtres vivants appartenant à cet écosystème de prairie naturelle.
Les fauches précoces et cultures intensives des poacées ont fait disparaître ces familles botaniques. On assiste à une uniformisation de l’alimentation du bétail (poacées plus intrants) où que ce soit sur le territoire national.
Or c’est la typicité du fourrage qui fait la typicité du fromage mais cette typicité a disparu.
La <France agricole a la réputation du pays du fromage à l’étranger, pourtant …
Les fromages traditionnels ont perdu leur identité de terroir qui porte en eux le respect de la nature du sol et du rythme des saisons. (Jacques WEBER) Les fromagers ont d’énormes difficultés à faire cailler le lait pour la fabrication des fromages. Au début de ces difficultés on a employé du yaourt au lait cru, maintenant le caillage du lait est un secret de laboratoire bien gardé.
Les exploitations agricoles sous la contrainte, comme rappelé précédemment, ont abandonné les usages loyaux et constants à la base des A O C. On trouve même des agriculteurs pour dénoncer l’achat de fourrages d’autres régions et on ne cache même plus les silos à farine au sommet des cols montagnards.
Le lait n’a plus la typicité des régions. Maintenant revendiquer une quelconque référence au terroir s’apparente à une tromperie pure et simple.(J WEBER) La publicité où l’on voit paitre des vaches au milieu de prairies fleuries ne sont que des photos montage. Les services de répression des fraudes sont intervenu pour faire cesser des communications où l’on pouvait lire que le gout subtil du fromage était dû à une fleur abondante et variée : même sanction quand on voyait un jeune agriculteur montrant un bouquet de fleurs à la télé disant ‘’voilà ce que nos vaches mangent’’ !
Les communicants ont été contraint de modifier leur publicité rédactionnelle ou de les supprimer mais les pratiques agricoles n’ont pas changé pour autant.
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Qu’est-ce que le développement durable ?
« Un mode de développement qui répond aux besoins du présent, sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». (1ere définition donnée en 1986 par la commission BRUTLAND et reprise en 1992 à RIO)
Donc absolument rien de nouveau, c’est même une notion ancienne de portée. Un engagement de tous les pays à promouvoir des modes de développement plus respectueux de l’environnement, de la solidarité sociale et de l’épanouissement culturel universelle
Plus qu’un choix, le développement durable est un impératif pour que les orientations choisies n’aboutissent pas à des impasses.
Or avec l’utilisation des néonicotinoïdes et la destruction des prairies fleuries l’agriculture fait exactement le contraire de sa communication !
Que ce soit avec les pesticides ou la disparition des ressources alimentaires c’est bien l’agriculture qui compromet l’existence des insectes pollinisateurs.
Maintenant les industriels du fromage s’affranchissent des contraintes A O C en créant des marques commerciales
Pourtant la biodiversité est une adaptabilité, c’est le tissu vivant de la planète, le ‘’hub’’ et la clé de voute de l’écosystème et l’assurance vie de l’humanité.
.C’est une norme positive.
.C’est une légitimité du choix et du divers
.C’est une métaphore des intérêts
.C’est un argument contre la standardisation
.C’est un ensemble de ressources qu’il faut protéger
.C’est un gage d’adaptabilité
.C’est un sujet de compromis
.C’est un facteur de production et de productivité
.C’est une spécificité territoriale de production fourragère
.C’est un enrichissement du paysage
.C’est une valeur intrinsèque
.C’est être sûr qu’on donnera la même chance à la prochaine génération (Jacques WEBER)
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.
Or la diminution de la biodiversité liée à l’agriculture intensive conduit notamment à un manque de disponibilité en plantes pollinifères et mellifères.
Il n’y a rien de passéiste à dire, bien au contraire, qu’il y a trente ans un agriculteur pendant les fenaisons coupait des plantes médicinales, l’hiver le bétail mangeait des tisanes et des fleurs séchées, le fenil sentait l’herboristerie et le bétail s’auto médicalisait.
C’est assurément le fondement de tout fromage A O C.
Les fromages AOC dans leur communication font tous référence aux fleurs mais après avoir pris un soin méticuleux à les faire disparaître auparavant !
Il est inutile de faire des études de terrain et dépenser de l’argent comme l’a fait l’Association Développement Apicole de Rhône Alpes et le Groupement des Apiculteurs Professionnel de Savoie pour savoir s’il y a des fleurs ou pas dans les prairies: c’est visuel
Et il est tout aussi inutile de nous amuser avec les prairies fleuries des Parcs Naturel Régionaux mises en place par les Chambres d’Agriculture et des apiculteurs complaisants parce que :
- d’une part les surfaces engagées sont ridicules. Les Bauges font 6000ha de prairies, (les deux Savoie, 310 000Ha) le projet porte sur 4000Ha et on a trouvé 18 agriculteurs intéressés. A raison de quelques parcelles éligibles par exploitation on arrive péniblement à une surface de quelques dizaines d’Ha. Pas de quoi en faire tout un fromage.
- d’autre part c’est trop facilement réversible, cette mesure ne tient que par le battage médiatique réalisé, quand ce n’est pas de la propagande (Les journaux agricoles ont pu titrer que « écologie et agriculture ne font qu’un » sic) et l’aide économique (89 € à l’hectare) sans cela rien n’inciteraient les agriculteurs à changer leurs techniques
- et enfin c’est complètement artificiel De plus souvent les prairies sont coupées après la visite des photographes et des élus bien avant la chute des graines.
Mais bien plus grave et il y a de quoi tomber à la renverse quand on lit le cahier des charges de ces prairies dites naturelles. La lecture du projet du parc naturel des Bauges (Savoie) sur ce point est édifiante www://Parcdesbauges.com
On a choisi arbitrairement 24 espèces qui servirait à qualifier ces prairies dites ‘’naturelles’’ dont :
. 2 renonculacées, Trolle d’Europe (Trollius europaeus) et Populage des marais (Caltha palustris) dont la famille botanique est des plus toxiques.) Ces plantes sont ignorées par les herbivores et n’ont aucun intérêt apicole puisque pollinisées par des diptères.
. Un rumex (Rumex acetosa) : aucun intérêt fourrager ou apicole
. Une marguerite (Leucanthemum vulgare) : aucun intérêt fourrager et apicole
De plus, bon nombre d’espèces botaniques nécessaires tout aussi bien à la qualité organoleptique du fromage et à la santé du bétail ont disparu, en sont absentes telles que :
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. Galium verum (nom vernaculaire : caille lait, le bien nommé)
. Carum carvi (cumin)
. Polygala vulgaris (poly=beaucoup gala=lait) la bien nommée
. Meum athamanticum (fenouil des Alpes)
. Carlina acaulis (carline acaule)
. Dianthus superbus (oeillet superbe) En voie de disparition alors qu’il y a trente il embaumait les prairies et qu’il était abondant
Etc. etc.
ou en nombre insignifiant telles que :
Onobrychis vicifolia (sainfoin) alors que ce dernier était l’un des fleurons de nos prairies de montagnes, et contribuait à une population d’abeilles et à une miellée abondante.
Extrait cahier des charges du parc naturel des Bauges.
. L’observation de 4 plantes indicatrices, parmi les 24 choisies, dans chaque tiers de la parcelle garantit que les habitats visés sont en bon état de conservation et que les prairies peuvent avoir une valeur agricole intéressante.
La méthode de contrôle consiste à parcourir la parcelle en diagonale et noter la présence de quatre espèces de plantes parmi une liste sur chaque tiers de la diagonale. Si un seul tiers ne contient pas les quatre espèces, la parcelle est jugée en anomalie
Il suffit maintenant de justifier la présence de 4 espèces pour avoir la qualification de ‘’prairies naturelles. ‘Voilà une nouvelle norme aux rabais. Mais quelle régression quelle entourloupe. Il ne faut pas s’attendre à une amélioration du potentiel mellifère et pollinifère car comme il est dit dans ce projet de parc naturel mais simplement de sauvegarder et de maintenir ce qui existe, qui plus est :
‘’les changements de pratique qui ont eu lieu répondent à une logique économique et de qualité de vie des agriculteurs sur laquelle il n’est pas souhaitable de revenir en arrière’’ sic
On ne peut être plus clair. Et les rédacteurs n’ont pas vu la contradiction : Ce projet se veut innovant mais dans le même temps on ne change rien dans les pratiques. Dans la réalité il s’agit simplement de sauvegarder ce qui existe. De plus, entreprendre et mettre en place des ilots de prairie naturelle non relayés avec d’autres prairies par des corridors eux aussi de prairies naturelles, c’est aller vers un échec certain. En dessous de 20% de la surface totale d’une région, la pérennité des espèces n’est pas assurée car la pollinisation croisée ne se fait plus.
Il se peut très bien que sur une parcelle on trouve les deux renonculacées, le rumex et la marguerite et on aura selon ce cahier des charges ‘’une prairie naturelle’’.
Pour recadrer les besoins d’une colonie, il suffit de relire J LOUVEAUX :’’ Le travail de l’abeille peut être facilement illustré par quelques chiffres qui parlent à l’esprit. Une pelote de pollen ne pèse pas plus, en moyenne, que 7 à 8 mg, soit 15 mg pour la charge complète. Un Kg de pollen représente 125000 pelotes. Le jabot de l’abeille a une capacité de 0,05 millilitre environ mais, pour le remplir, il aura fallu visiter des centaines de fleurs, se qui demande beaucoup de temps et de Km de vol.’’
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Avec quatre espèces par parcelle dans les Bauges il faudra également beaucoup de surface !
Ce dont a besoin l’apiculture, c’est de fleurs dans toute leur diversité et sans pesticides.
. Si tel avait été le cas, jamais la disparition de l’abeille n’aurait fait la une de l’actualité
Malheureusement on a pu lire récemment dans un éditorial apicole que: ‘ceux qui croient à un monde sans pesticides et à un retour des prairies naturelles sont de doux rêveurs’’ C'est-à-dire l’exact contraire de ce qu’il faut faire. Lire de pareilles incongruités de la part d’un président de syndicat apicole est inadmissible et affligeant.
Les causes de la disparition de l’abeille sont maintenant clairement identifiées: Disparition des ressources nectarifères et pollinifères plus les pesticides avec en cadeau le varroa, le reste n’est que conséquences, y compris les maladies opportunistes.
Certes l’abeille n’est pas l’unique bio indicateur de la disparition de la biodiversité mais elle est un témoin essentiel de la disparition des fleurs dans les prairies.
Un autre témoin important de la disparition des fleurs qui est oublié volontairement ou non par la filière apicole et qui vient grever le coût des exploitations apicoles : c’est le nourrissage. Bon nombre d’entre nous ont connu l’époque pas si loin que ça où le nourrissage des colonies était exceptionnel et ont vu arriver les nourrisseurs. Maintenant il n’est pas rare que certaines années la quantité de sirop et de candi donné aux colonies est bien supérieure à la quantité de miel produite. C’est même devenu, dans certains départements l’un des premiers postes de dépenses de l’apiculteur .Le nectar que les abeilles ne rentrent plus dans la ruche parce que les fleurs ont disparu est remplacé par un hydrolysat d’amidon de céréales. C’est tout de même un comble que l’apiculture soit devenue un débouché pour les céréaliers et les betteraviers. Le nourrissage est physiquement dur pour l’apiculteur en fin de saison de plus écologiquement et économiquement absurde.
Comment conserver production agricole et maintien de la diversité floristique ?
. L’appauvrissement biologique, jusqu’à présent a eu un impact sur des dimensions uniquement éthiques ou esthétiques alors que la disparition définitive de plantes et d’insectes aura des conséquences sur l’agriculture et la médecine. (J WEBER)
Devant la survie de l’abeille et la diminution de la biodiversité il est particulièrement choquant de constater l’autisme et l’inaction des décideurs agricoles Le discours sur la nature est un discours de société auquel les décideurs agricoles devraient être associés et responsables (J WEBER) Mais la filière apicole n’est ni écoutée ni considérée. Il suffit pour cela de relire les rapports de l’AFFSA, du député SADDIER ou du rapport parlementaire.
L’AFSSA à qui personne n’avait demandé d’intervenir s’est selon sa propre expression ‘’auto saisie’’ du dossier de la mortalité des abeilles pour produire un document ‘’truffé’’ d’erreurs et qui inverse cause et conséquence. Ce rapport envisage même une mise en oeuvre de mesures coercitives auprès des apiculteurs (page 100 du rapport). Le conseil de l’ordre
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des vétérinaires a émis un communiqué de presse pour dire qu’il émettait des réserves et prenait ses distances vis-à-vis de ce rapport. Quant aux différentes sociétés entomologistes elles ont déclaré que ce rapport était complètement déconnecté de la réalité. On ne peut être plus clair.
Le rapport du député SADDIER (ex technicien de chambre d’agriculture) qui prône un institut technique apicole pour finalement le mettre entre les mains des firmes phytopharmaceutiques. Le discours tenu Le à VILLEFRANCHE/SAONE il y a quelques années, n’avait rien à voir avec le rapport écrit : Le discours était écologique mais le rapport écrit omet sciemment de mentionner des dégâts des pesticides et de la disparition des ressources alimentaires des abeilles. Les écrits restent, mais les paroles s’envolent.
Et enfin les parlementaires dans un rapport plus récent se grattent, eux aussi, la tête pour savoir si les insecticides tuent les insectes.
L’Etat à travers le Ministère de l’agriculture et AGRIMER préfère attribuer une ‘’aide ‘’ à la reconstitution du cheptel’’ plutôt que de résoudre les problèmes à la source. Les décideurs agricoles, ont donc parfaitement intégré la disparition de l’abeille et de sacrifier l’apiculture. La filière apicole est donc pour le moment maintenue dans cette situation. Mais qu’adviendra-il si les apiculteurs qui ont choisi l’élevage plutôt la production de miel ont un environnement apicole qui se dégrade comme c’est la tendance lourde ? Qui pourra remplacer le cheptel disparu et à quel prix?
Certes toutes les régions françaises ne sont pas affectées de la même façon par la diminution des ressources nectarifères et pollinifères ou par les produits phytosanitaires. Il y a des zones épargnées : ce sont les exceptions qui confirment la règle.
Quand l’abeille apporte 1 à l’apiculture, elle apporte 25 au maraichage et à l’arboriculture, 50 voire 100 aux semenciers Avec des ratios comme ceci les décideurs agricoles marchent sur des oeufs. Et continuer à ignorer les conséquences de la disparition des abeilles ces décideurs pourraient bien se retrouver dans la situation de l’arroseur arrosé. Sauf que ce ne sera pas du burlesque mais bien une catastrophe majeure.
La filière apicole a été contrainte, avec le Gaucho de prouver que les insecticides tuent les insectes. Mais ce n’est pas la seule aberration que la filière a dû subir. Qui n’a pas entendu dans une administration agricole ou dans les locaux de chambre d’agriculture que ‘’ l’apiculture ça n’existe pas’’ ou ‘’qu’il faut donner du temps au temps’’. C'est-à-dire ne rien faire. Alors que dans le même temps on n’arrête pas de répéter à tout cadre de toute entreprise qu’il faut être réactif et flexible.
. Le pollen qui il y a trente ans encombrait les cadres de corps, à tel point que le professeur Rémi CHAUVIN avait suggéré de le récolter pour nourrir le bétail. Ce pollen est maintenant en déficit constant dans les régions de production laitière. Rêvons un peu : du bétail
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nourri avec des protéines végétales récoltées par des apiculteurs, cela aurait quand même beaucoup plus d’allure qu’un bétail nourri avec des farines carnées !
Tout le monde s’accorde à reconnaître l’abeille comme le seul vecteur essentiel de pollinisation maîtrisable par l’homme donc indispensable au maintien de la biodiversité. La situation n’est pas irréversible. A condition qu’on le veuille il faudra plus de temps à restaurer les écosystèmes qu’il a fallu pour les détruire.
Le ratio économique ente la préservation d’un écosystème et sa restauration est de 1 à 1000.
Par exemple :
A ce propos il serait bon d’écouter le ‘’Pape’’ de la biodiversité en FRANCE (Jacques WEBER)

’Il y a urgence dans des investissements massifs du potentiel naturel’’df]

Sébastien 09
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Re: Disparition des ressources nectarifères ...

Message#2 » dim. mars 13, 2016 9:52 pm

Merci Foué, :super .
Tout est là, y a qu'à ce baisser :wink:

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rytounet
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Re: Disparition des ressources nectarifères ...

Message#3 » dim. mars 13, 2016 11:03 pm

Merci bien Foué pour le partage.
As-tu un lien ?
Être dans un trou perdu, maintenant c'est être au TOP

Manulab
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Re: Disparition des ressources nectarifères ...

Message#4 » lun. mars 14, 2016 8:47 pm

Je ne sais pas si c'est celui qu'a trouvé Foué, mais en tout cas voici un lien vers ce document :
http://www.apiservices.biz/bases-de-don ... -laitieres
C'est dans le site http://www.apiservices.biz, rubrique "bases de données", sous rubrique "articles" ; dans la liste ce jour c'est l'article le plus récent.

[note de modération, décembre 2018, actualisation du lien vers le pdf
https://www.apiservices.biz/documents/a ... iferes.pdf
ou la page du site apiservice.biz
https://www.apiservices.biz/fr/articles ... -laitieres

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panpone
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Re: Disparition des ressources nectarifères ...

Message#5 » lun. mars 14, 2016 8:54 pm

on voit bien l'enchaînement fatal des conséquences d'un ensemble de visions à court terme !
Jean-Paul


conseil au nouveaux arrivants : pensez à préciser votre localisation sur votre profil, au moins département et ville, plus si vous voulez, afin d'être visible sur la carte de localisation des apiculteurs warré
Merci

cantalou
Messages : 71

Re: Disparition des ressources nectarifères ...

Message#6 » mer. mars 16, 2016 8:35 pm

:bouquin :super

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